La Difunta Correa est une sainte (non reconnue
officiellement par l’Église catholique) à laquelle il est voué un culte important
en Argentine et dans les pays alentour. Son histoire prend place dans la région
désertique de San Juan, près de la cordillère des Andes, dans les années 1840.
Dans cette période de guerres civiles, le mari de Marià
Antonia Deolinda Correa s’était fait emprisonner. Inquiète et dévouée, Deolinda
Correa entreprend de le retrouver afin de s’occuper de lui. Ainsi, elle suit les
traces des militaires dans le désert, accompagnée de son enfant encore
nourrisson. Lorsqu’elle arrive au bout de ses vivres, au sommet d’une colline,
épuisée, affamée et sentant qu’elle allait mourir de soif, elle s’allonge à
l’ombre d’un arbre et s’abandonne à la mort en priant Dieu de sauver son enfant
qu’elle tient dans ses bras. Et le miracle s’accomplit. Trois jours plus tard,
des paysans de Vallecito, le village le plus proche, découvrent le corps mort
de Deolinda Correa, mais le nourrisson est vivant, toujours accroché au sein de
sa mère. Ils récupèrent l’enfant qu’ils élèveront et donnent une sépulture et
une tombe à la pauvre femme. Peu de temps après, un riche gaucho de passage (Don
Pedro Flavio Zeballos) perd tout son troupeau dans les collines suite à une
tempête. Sur le conseil des paysans locaux, il se recueille sur la tombe de la
défunte (une simple croix) et implore son aide, lui promettant de lui
construire un sanctuaire. Une fois son bétail retrouvé, le gaucho tient sa
promesse et érige une chapelle sur le haut de la colline où son corps a été
retrouvé. C’est ainsi qu’est né le culte de la Difunta Correa.
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| La chapelle du sport. |
Sur ce même lieu, il existe maintenant une trentaine
de chapelles, chacune dédiée à un thème particulier (celle du sport, celle de
la police, de l’armée, des mariées, des constructeurs, etc.). Selon le modèle
de l’histoire du gaucho Don Pedro, la tradition veut qu’un premier pèlerinage
soit effectué, où une requête est adressée à la Difunta Correa et où sa
protection est invoquée, puis un deuxième lorsque le vœu a été exaucé, où le
fidèle amène une offrande symbolisant le vœu et sa réalisation pour remercier
la sainte. On trouve ainsi de multiples objets dans ces chapelles et aux
alentours : des tresses de cheveux, des horloges, des robes de mariée, des
radios, des cahiers scolaires, des plâtres, des offrandes votives qui font
référence à des organes ou des parties du corps humain (cœur, foie, jambe), des
colliers, des lettres, des vêtements d’enfant, des lolettes, des poupées, des
peluches, des trophées sportifs, des bijoux, des cannes, des plaques de
voiture, des voitures miniatures, des maquettes de camions, d’autobus et surtout
de maisons, etc. Entre toutes ces offrandes, la photographie constitue un objet
symbolique particulièrement utilisé dans la dévotion dédiée à la Difunta
Correa: on en trouve des millions, les plus vieilles remontant au début du
siècle, en noir et blanc et en couleur, où les fidèles se représentent dans des
moments importants de leur vie (mariages, naissances, baptêmes, anniversaires),
et indiquent le passage du temps, au travers des circonstances de la vie. On
trouve par exemple plusieurs photos d'un même enfant à différents stades de son
développement, ou des images qui parlent d'un avant et d’un après : un malade
qui a guéri, un autre avec des béquilles qui maintenant marche. On trouve aussi
des photos qui représentent des accomplissements : des logements achevés, des
entreprises prospères, des équipes de football victorieuses, etc.
| Autel au bord de la route. |
Un autre aspect de cette dévotion se déploie dans
toute l’Argentine et de manière plus modeste. La Difunta Correa fait partie de
ces « Santos ruteros », c’est-à-dire de ces saints auxquels on
adresse des petits autels le long des routes. Ceux de la défunte sont
reconnaissables par les montagnes de bouteilles d’eau que les fidèles déposent en
offrande devant des chapelles miniatures, parfois très rudimentaires. Toute
cette eau pour conjurer la soif fatale de Deolinda Correa.
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